Com’On Leaders a décidé d’accompagner le Rapport State Of The Media – 2024, Journalistes : l’exception française ? réalisé chaque année par Cision.
Nous avons souhaité connaître de façon individuelle, auprès des journalistes, attaché(e)s de presse, quels sont leur ressenti, leurs attentes vis-à-vis de leur profession ? Quelle place tiennent les nouvelles technologies comme l’IA, ou encore la data et les réseaux sociaux dans l’exercice de leur métier ?
Nous vous proposons un décryptage par ceux qui font l’information d’aujourd’hui, un regard croisé qui positionne la gouvernance et la confiance au centre des interactions, mais aussi encourager une approche critique et diversifiée de l'information et renforcer les pratiques de vérification de l'information…
La parole est à Cyrille Frank, Fondateur Mediaculture.
Quels sont les chiffres qui t'ont le plus étonnés ?
1/ Celui qui a le plus retenu mon attention c'est que 60% des journalistes disent avoir eu du mal au cours des 12 derniers mois à « garder le rythme malgré la baisse des effectifs et des ressources ». C'est cohérent avec les autres réponses : 71% utilisent les réseaux sociaux pour publier/promouvoir du contenu, 79% mesurent leur succès à la taille de l’audience, au nombre de vues.
Les médias et les journalistes sont toujours dans une course quantitative à l’audience. Ils produisent toujours plus de contenus pour faire du trafic, alors que la baisse des effectifs et l’évolution du modèle d’affaire (pub et abonnements) devraient les amener à faire des choix plus qualitatifs. Et à soigner la relation au lecteur plutôt que de publier un énième nouveau contenu. Contenu qui peinera à trouver son audience en raison d’une concurrence de l’attention toujours plus forte. Et ce n’est rien comparé au tsunami de contenus qui va bientôt déferler avec l’IA.
2/ J'ai également été surpris par le retour de Facebook dans le top 3 des réseaux que les journalistes souhaitent investir davantage l’an prochain.
J’avoue que je comprends mal ce regain d’intérêt pour Facebook, sachant que le réseau social a dépriorisé l’actualité dans son algorithme de diffusion. Et que le réseau est de plus en plus vieillissant : ce n’est pas là que se trouvent les futurs lecteurs. Peut-être est-ce pour compenser le déclin d’intérêt pour Twitter qui n’apporte plus de trafic (il n’en n’a jamais apporté beaucoup, mais les retweets entre pairs étaient flatteurs pour les journalistes). Twitter qui est devenu une plateforme toxique où les journalistes (et tous usagers) se font invectiver, avec agressivité et parfois même, violence verbale.
Quelles sont les attentes des journalistes par rapport à un CP ? Quel est l'état de la relation entre les professionnels des RP et les journalistes ?
Les journalistes attendent des CP qui soient pertinents par rapport aux sujets qu’ils traitent (ciblés), qu’ils soient sourcés (infos sur les données de l’échantillon sur une étude par exemple), qu’ils soient sérieux (information non déformée pour les besoins de valorisation de la marque, de l’entreprise etc.). Ils apprécient aussi un ton plutôt neutre (et pas dithyrambique ou hagiographique qui accroissent leur méfiance naturelle vis-à-vis de la crédibilité du CP).
Les journalistes apprécient ensuite la disponibilité du service RP (ou de l’entreprise) pour répondre à leurs questions complémentaires, soit par téléphone, soit par e-mail (on pourrait rajouter par visiophone de plus en plus fréquemment).
Quelle est la différence métier entre un journaliste de presse régionale et un journaliste de presse nationale, entre une presse grand public et une presse pro, entre un support écrit, TV, Audio... ?
Il y a tellement de différences qui tiennent à l’organisation très différente de tous ces médias ! En PQR, les journalistes sont très polyvalents sur les sujets dans les locales (les localiers traitent tous les sujets, ce sont des « couteaux suisses »). Mais ils sont encore assez spécialisés sur les services centraux (le desk et le national), quoi que souvent plus polyvalents quand même qu’en PQN. Ainsi un journaliste société en PQR pourra traiter de sujets santé ou sciences car il n’y a pas toujours de journalistes dédiés en la matière. En revanche, en PQR, l’ancrage devra être non pas thématique, mais géographique : s’agit-il d’un événement, d’une entreprise de la région ? Sinon, l’intérêt pourra être faible. Si on a un acteur local à valoriser c’est toujours plus intéressant pour le journal/le média.
Au niveau de la différence entre journaliste pro et généraliste : la comparaison se fait surtout au niveau d’expertise et de précision attendus par le journaliste, la récence et la qualité de l’étude (taille et diversité de l’échantillon notamment) ou des chiffres communiqués. Et l’explication approfondie des chiffres. Si un CP communique sur une hausse significative de ventes de tel ou tel appareil en France, comment l’explique-t-on ? Est-ce pareil sur d’autres marchés ou spécifique à la France etc. Il faut aller plus loin, car le traitement en presse pro sera plus développé.
En Tv, le sujet devra être « visuel », si possible spectaculaire ou avec un agrément visuel. Un sujet sur la fréquentation des zoos, facile. Un sujet sur une nouvelle solution comptable pour les PME, plus dur. Les sujets grand public devront être « concernants » pour le plus grand nombre : argent, école, vacances, sécurité routière, logement, santé… Avec une illustration possible de citoyens ordinaires (courses au supermarché etc.). En radio, illustration sonore (sons d’ambiance) pour du reportage, sinon même caractéristiques que pour l’écrit, avec nécessité d’avoir quand même des experts disponibles pour des interviews qui accompagnent souvent les chiffres / faits présentés.
Le mot de la fin :
Je serais curieux de savoir ce que pensent les journalistes de leur management (sont-ils bien traités et les managers sont-ils compétents ?) et de la stratégie de leur média (ont-ils confiance ou pas ?), que devraient-ils faire d’après eux ?
Etude monde 2024 : Rapport sur l’État des Médias
Quels sont les nouveaux défis posés par l'évolution des comportements du public ?
Comme chaque année et pour la 15ème édition, Cision a interrogé les journalistes à travers le monde pour dresser un état des lieux de la profession et connaître leurs sentiments sur l’évolution de leur métier.
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